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Valdelice Veron, la porte-parole des Indiens Guarani-Kaiowa accuse le Brésil d'"écocide"

Valdelice Veron, la porte-parole des Indiens Guarani-Kaiowa accuse le Brésil d'

Source: www.lemonde.fr
Chassés de leurs terres par les producteurs d'éthanol, 300 Guarani ont péri en dix ans.
Elle a le sourire triste de ceux qui ont fait de leur vie un combat. Sous sa coiffe indigène qu'elle porte fièrement, l'Indienne laisse percer un regard noir dans lequel se mêlent rage, colère et frustration.

Valdelice Veron, une des porte-parole du peuple indigène Guarani-Kaiowa, était invitée à témoigner lors du " sommet des consciences sur le climat ", qui s'est tenu à Paris mardi 21  juillet. A 37  ans, la combattante a accepté de quitter le Brésil pour la première fois de sa vie pour témoigner des souffrances de son peuple, portée par " l'espérance que quelqu'un entende le cri de mon peuple et décide d'agir ".

Mais avant de monter à la tribune du Conseil économique, social et environnemental, il a fallu quitter l'Etat du Mato Grosso do Sul, en Amazonie, et rompre les barrages tenus par les " bandits armés ". Des hommes de main, chargés d'expulser les indigènes de leurs terres, à la solde de grands propriétaires fonciers qui exploitent la forêt. Assassinats, viols, kidnappings d'enfants, les pires moyens ont été utilisés pour forcer les indigènes à quitter leurs terres, témoigne-t-elle. Près de 300 Guarani-Kaiowa ont été tués en dix ans.

Eloignés de leurs terres, les Guarani, qui vivent, se nourrissent, se soignent de ce que leur donne la terre, sont condamnés à la misère. Certains ont été placés et confinés dans des réserves, contraints de travailler dans les plantations de canne à sucre pour un salaire de misère ou parfois une simple ration de nourriture.

Le groupe français Louis Dreyfus Commodities, deuxième plus gros producteur d'éthanol du Brésil et qui emploie plus de 20 000 personnes dans le pays, avait d'ailleurs dû répondre des conditions de travail précaires de sa main-d'œuvre en  2009. Valdelice Veron et les siens ont refusé d'être placés dans des réserves. " Désormais, nous ne sortirons plus de notre terre, quelles que soient les attaques que nous subissons, assure-t-elle. Nous démarquerons notre territoire avec notre propre sang s'il le faut. " Depuis une dizaine d'années, plusieurs centaines d'entre eux réoccupent les parcelles des éleveurs et planteurs pour exiger qu'on leur rende leurs terres ancestrales. Le père de Valdelice Veron, Marcos, le chef des chefs, le grand cacique des Guarani-Kaiowa, a été assassiné en  2003, torturé à mort en guise de représailles.

Déforestation

Au cœur de la guerre entre les 45 000 Guarani-Kaiowa et les grands propriétaires terriens qui réclament des terres pour étendre leur activité, se trouve le bioéthanol dont le Brésil est le premier producteur mondial. Ce biocarburant se fabrique notamment à partir de la canne à sucre, dont la culture est une des causes majeures de déforestation dans le pays. " Nos territoires sont en train d'être détruits par des hommes avides ",a accusé Valdelice Veron à la tribune du CESE, évoquant un crime " écocide ".

Les Guarani-Kaiowa demandent au gouvernement de Dilma Rousseff  d'appliquer la loi. La Constitution du Brésil stipule depuis 1988 que les peuples indigènes ont des " droits culturels et territoriaux " fondés sur leur héritage ancestral. Le texte ordonnait la démarcation des territoires indigènes dans une période de cinq ans. Les Guarani-Kaiowa attendent toujours cette délimitation.

Ils ont pourtant passé avec succès les deux premières étapes du processus d'homologation pour 22 des 39 territoires réclamés. Un conseil d'anthropologues a certifié qu'il s'agissait de terres indigènes, puis un tribunal fédéral a confirmé la validité de ces rapports. Mais il manque une dernière étape pour que les décrets soient effectifs : la signature de Dilma Rousseff.

" Elle peut, avec son stylo, mettre fin aux souffrances de tout un peuple, je ne lui demande qu'une chose, qu'elle signe, supplie Valdelice Veron. Le gouvernement, les autorités locales, les propriétaires fonciers, tous sont liés au commerce du bioéthanol.  Les enjeux économiques sont trop importants. La canne à sucre vaut plus que la vie d'un enfant. "

" Les grands propriétaires, les ruralistas, jouissent d'une influence considérable au Brésil ", rappelle Arkan Simaan, membre de l'ONG Planète Amazone. " N'oublions pas que la nouvelle ministre de l'agriculture est une représentante de l'agrobusiness. "Katia Abreu a été nommée en décembre dernier après la courte réélection de Dilma Rousseff à la tête du pays. Elle était auparavant la présidente du CNA, le plus grand syndicat de propriétaires terriens du Brésil.

Les promesses du gouvernement brésilien, Valdelice Veron les connaît depuis longtemps. Depuis ce jour où son père l'a emmenée rencontrer Lula da Silva, élu président du Brésil et qui leur avait promis pendant sa campagne que la porte de son bureau leur serait toujours ouverte. Marcos Veron et sa fille l'ont pris au mot. Mais la porte du président ne s'est jamais ouverte.

Maria Laforcade


© Le Monde / article original

Date de l'article : 23/07/2015

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