Belo Monte :
pétition du Cacique Raoni

A ce jour 502905 signatures.

Vérifier la validité de votre signature




Actualités

Grands barrages en Amazonie : "nous n’abandonnerons pas la construction de Tapajós", dit le ministre Gilberto Carvalho

Grands barrages en Amazonie :

Carvalho lors d'un séminaire sur les conflits fonciers; Le ministre s'occupe des relations avec les mouvements sociaux

Fonte : amazonia.org.br
Brésil - le ministre Gilberto Carvalho a défendu l'envoi de la Force de Sûreté Nationale pour réprimer les protestations des indigènes contre la construction du barrage Belo Monte et il a dit que, si nécessaire, la même position sera adoptée sur le fleuve Tapajós, dans l'Etat du Pará.

Chef du Secrétariat Général de la Présidence, responsable des relations entre le Palais du Planalto (siège de la présidence) et les mouvements sociaux, le ministre Gilberto Carvalho affirme que la présidente Dilma Rousseff s'est éloignée des "principaux acteurs de l'économie et de la politique" pendant ces quatre dernières années.

Dans une interview à BBC Brasil, dans laquelle il fait un bilan des quatre dernières années du gouvernement, le ministre admet également que la gestion actuelle "a peu avancé" sur les demandes des mouvements sociaux, surtout dans les réformes agraire et urbaine et dans la démarcation des terres indigènes. Selon lui, "il a manqué de la compétence et de la clarté" au gouvernement pour avancer sur le sujet indigène et sur quelques épisodes, cela s'est retourné contre lui.

Il a défendu, cependant, l'envoi de la Force de Sureté Nationale pour réprimer les protestations des indigènes contre la construction de l'usine Belo Monte et il a dit que, si nécessaire, la même position sera adoptée sur le fleuve Tapajós, au Pará, où il y a le projet de construire d’autres usines hydro-électriques dans les années à venir.

Ci-dessous les principaux passages de l'entretien, accordé jeudi au Palais du Planalto, à Brasilia.

___________________

BBC Brasil - Dans son premier discours après sa réélection, la Présidente a promis d'amplifier le dialogue avec la société. Est-ce que c'était une façon de reconnaitre que le gouvernement a failli dans ce domaine ?

Gilberto Carvalho - Le discours de la Présidente était tourné vers le besoin de réunification du pays, parce qu'une campagne électorale laisse des séquelles. Mais il y a eu des manquements, c'est vrai. Le gouvernement a pratiqué le dialogue pendant ces années, mais, pour le modèle de la société brésilienne d’aujourd'hui, il y a beaucoup à faire. 

BBC Brasil – Sur quels points?

Carvalho - Par-dessus tout dans le dialogue avec les principaux acteurs en économie et en politique. Le gouvernement de la présidente Dilma n'a pas engagé de manière assez intense, comme ce fut le cas à l'époque de (l'ex-président) Lula, le dialogue avec les acteurs avant de prendre une décision. On n'a pas écouté avec assez d'attention les différences de point de vue, pour produire des synthèses qui répondent aux intérêts divers. Il y a une volonté explicite de la Présidente de changer cette pratique.

BBC Brasil – Les mouvements sociaux se plaignent également du manque de dialogue.

Carvalho – Le dialogue n’a pas manqué, ce qui a manqué dans le cas des mouvements sociaux ce fut la réponse aux demandes. La réforme agraire et le sujet indigène ont peu avancé. La réforme urbaine  les structures de fonctionnement dans les villes, la mobilité urbaine – non plus n’a pas été abordée conformément aux attentes des mouvements sociaux.

BBC Brasil – Comment avancer sur ces thèmes ?

Carvalho - Une partie incombe à la présidente. C'est elle qui doit recevoir dans son cabinet les forces des divers secteurs de la société. Si le président pratique plus de dialogue, il incite l’ensemble du gouvernement à le pratiquer.

Pour répondre aux demandes, elle doit renforcer certains organes du gouvernement. Dans le cas de la réforme agraire, l’Incra (Institut National de Colonisation et de Réforme Agraire). Dans le cas de la politique indigéniste, la Funai (Fondation Nationale de l'Indien). Cela implique d’augmenter le budget, procéder à des concours, acheter des terres, indemniser ceux qui sont dans les terres indigènes.

BBC Brasil – La Funai est sans président effectif depuis juin 2013, et le gouvernement a paralysé toutes les démarcations de terres indigènes. Pourquoi croire que dans les quatre prochaines années la politique indigéniste changera ?

Carvalho – Vers la fin du mandat, nous avons fait une évaluation avec la présidente et elle-même a exprimé le fait que nous devons avancer. Pour elle il y a deux préoccupations : la reformulation de la santé indigène et la démarcation, changeant la loi et insérant dans le budget les ressources nécessaires pour indemniser les familles qui sont dans les terres indigènes.

Notre focus est surtout sur les Guarani Kaiowá et les Terenas dans le Mato Grosso do Sul, où la situation est d’une misère absolue: morts, et suicides.

Maintenant on ne peut pas refuser d’admettre qu’une résistance idéologique et économique très forte par rapport aux questions indigènes a beaucoup grandi, et a malheureusement tendance à grandir encore plus, et est fortement représentée au Congrès.

BBC Brasil - Le gouvernement n'a pas contribué à renforcer cette résistance quand l’AGU a publié l décret 303, augmentant les restrictions de reconnaissance des zones indigènes, ou bien quand la « Casa Civil » a annoncé que d'autres organismes comme l’Embrapa, deviendraient acteurs sur les démarcations ? C’était des tirs dans le pied ? 

Carvalho - C’était des tirs dans le pied, oui. Le décret 303, particulièrement. Dans le cas de la « Casa Civil », dans la gestion de la Ministre Gleisi (Hoffmann), nous devons reconnaître qu'il y a eu des signes contraires qui n’ont pas été favorables.

Carvalho défend que le Brésil doit réduir sa dépendance dans l’utilisation des pesticides


BBC Brasil - Le gouvernement n'a pas également alimenté cette résistance en s’alliant à des politiciens connus pour être adversaires des Indiens, comme la Sénatrice Kátia Abreu (PMDB-TO) ? 

Carvalho - Attribuer cette faute au gouvernement est une absurdité. La droite grandit parce qu'elle grandit. Le parti de Kátia Abreu est dans notre base. Si je limite ma base à ceux qui pensent comme nous, nous n'approuverons aucune loi. Faire l'alliance signifie travailler avec l'adversaire, aux idées divergentes, voilà ce que j'en dis.

A aucun moment Kátia Abreu n’a été responsable de notre manque d’avancée. Nous n'avons pas avancé parce par manque de compétence et de clarté. Mais cela ne veut pas dire que rien n’a été fait.

BBC Brasil - Qu'est-ce qui a été fait ?

Carvalho - Quelques terres ont été délimitées et il a été fait deux expulsions historiques (l'expulsion des non indigènes des terres Marãiwatsédé, dans le Mato Grosso, et Awá Guajá, dans le Maranhão). Nous avons, en plus, fait face aux forces dans le Congrès. J'ai été appelé deux fois à la Commission de l'Agriculture pour prendre des coups.

De plus, une discussion a été lancée sur la façon de résoudre les conflits. L'un d'eux concerne l'homologation de la terre des Munduruku, une des plus grandes terres indigènes du pays, dans le Sud du Pará, où il n'y avait aucun conflit. Un autre a cours dans le Mato Grosso do Sul, où le propre gouvernement a emmené des gens là-bas et les a titularisées. Cela génère des problèmes énormes, parce que la loi ne permet pas d'indemniser les expropriations en terre indigène. Nous devrons changer la loi.

BBC Brasil - Le gouvernement a utilisé la Force Nationale pour réprimer des protestations contre des grands ouvrages, comme celui de Belo Monte. Il n’y a pas une autre forme de relation avec ces résistances ?

Carvalho - Je pense qu'il y a eu des erreurs à Belo Monte dans le processus d'implantation du chantier, dans le rythme des compensations, etc…. Maintenant, quand vous maintenez un dialogue permanent - et installez sur place un bureau gouvernemental pour dialoguer - et qu’on appelle à l’occupation d'un chantier d’intérêt national, c’est le devoir de l'État de s'efforcer à ce que la construction reprenne son rythme. Nous sommes face à une crise énergétique dans le pays qui n'est pas mineure et nous devons réaliser Belo Monte.

BBC Brasil - La même position vaudra-t-elle pour les usines hydroélectriques que le gouvernement veut construire sur le fleuve Tapajós, au Pará ? Il y a des plaintes disant que le gouvernement ne respecte pas la Convention 169 de l'Organisation Internationale du Travail (qui exige que l'on consulte des Indiens sur les mesures qui les affectent).

Carvalho - Nous essayons, avec une équipe sur place, de mettre en œuvre la Convention 169, mais il y a du sabotage surtout de la part d'entités.

BBC Brasil - Quelles entités ?

Carvalho - Je ne le dirai pas. Hier notre compagnon a téléphoné indiquant que les Indiens sont contraints, parce qu'ils veulent dialoguer, mais ils ont peur des entités, qui déterminent leur comportement. Nous sommes dans une situation difficile.

C'est une intervention dans une région où l'État est très absent. Une des erreurs de Belo Monte a été que l'État n’est pas arrivé avant la construction et ses conséquences. Mais nous n’abandonnons pas la construction de Tapajós. La consultation n'est pas délibérative. Elle doit être faite pour répondre aux demandes, réduire les impacts, mais elle n’a pas un droit de blocage.

BBC Brasil - Que pensez-vous de la demande du Ministère Public afin que les riverains soient également consultés sur le projet ? Ils seront entendus ?

Carvalho - Ils le seront. Je ne vois pas de problème. 

BBC Brasil - L'opposition a grandi au Congrès et il y a aujourd’hui un climat hostile au gouvernement. Comment allez-vous faire pour approuver les réformes promises ?

Carvalho - Il y a encore une répercussion du processus électoral. En janvier, les choses ne seront plus pareilles. La composition ministérielle va prendre en compte le besoin de revoir ces forces au Congrès.

Un autre aspect est la gouvernabilité sociale. L'élection a montré combien la militance sociale est prête à lutter. C'est un facteur sur lequel nous devons travailler pour faire avancer les processus, surtout la réforme politique. S'il n’y a pas de contestations dans les rues, s'il n’y a pas de mobilisation, il n’y a pas d'espoir d’avancée au Congrès.

BBC Brasil - Le nouveau gouvernement commence face à un nouveau scandale de corruption, maintenant à la Petrobrás. Vous avez peur de l’extension de ce cas ?

Carvalho – Celui qui a déjà vécu ces neuf dernières années dans ce climat n'a pas à le craindre. Il aurait à craindre s'il y avait eu une participation quelconque de Dilma ou de Lula dans cette histoire. Comme nous savons qu’il n’y en a pas, nous allons gérer cela comme nous l'avons fait les autres fois. Surtout parce que notre position dans cette histoire est de ne pas être de connivence ni d'être complaisant avec la corruption. Nous allons tailler dans la chair et libérer les institutions pour qu’elles fonctionnent à pleine vapeur.

Il est évident que n'importe quelle accusation de ce type, qui implique une entreprise de la taille de Petrobrás, crée des problèmes. Ce serait fou de nier que nous ne sommes pas inquiets. Ce que je peux vous dire c’est que nous ne sommes pas inquiets en ce qui concerne le noyau du gouvernement, de la présidente Dilma, de l’ex-président Lula, des ministres qui sont actuellement au gouvernement. Mais nous n'avons pas encore d'informations de comment ce dossier est instruit, ni de son contenu.

 

Politique des drogues

BBC Brasil – La population carcérale au brésil a fortement augmenté ces dernières années en raison de la répression du trafic de drogues, mais la violence n'a pas diminué. Pourquoi le gouvernement n'envisage pas de revoir cette politique ?

Carvalho – Le thème des drogues est d'un abordage difficile. Nous suivons l'expérience de l'Uruguay. Personne n'est encore très sûr. Tant que la population n'a pas de position mûre, le gouvernement n'a pas les moyens de prendre telle ou telle décision.

Je sais combien il est absurde d'arrêter un jeune qui a un peu d'herbe sur lui et de le jeter à la Papuda (prison du district fédéral), mais je ne sens, de la part du gouvernement, aucune initiative pour affronter cela dans les 4 prochaines années.

 

Violence policière

BBC Brasil – Que pensez-vous de la proposition de démilitariser la police ?

Carvalho – J'ai beaucoup de sympathie pour cette proposition, mais c'est ma position personnelle. dans le cadre d'une réforme politique, d'une réforme plus ample de l'État, je crois que nous aurons à affronter ce thème. Mais je ne pense pas que la démilitarisation va tout résoudre. La torture dans les prisons n'est pas pratiquée par la police militaire mais par la police civile. 

BBC Brasil – Pourquoi le gouvernement ne s'est-il jamais positionné contre la violence policière de la même manière qu'il a condamné le vandalisme dans les manifestations ?

Carvalho – À aucun moment, dans mes propos ou dans ceux de la présidente, je n'ai vu une omission. Si bien que personnellement j'ai eu un problème après avoir ouvertement critiqué la police militaire de Brasilia lors d'une manifestation des sans-terre ici à Brasilia. J'ai été la cible d'une tentative de convocation au Congrès et d'attaques très dures de la PM. 

Nous avons critiqué la violence des manifestations car nous comprenions qu'elle conspirait contre les manifestations elles-mêmes. 

Crise de l'eau et agenda environnemental

BBC Brasil – Des chercheurs disent que la crise hydrique que nous affrontons est aussi une crise environnementale. Cependant, le gouvernement maintient ses subventions à l'industrie automobile et a stimulé de gros investissements pour les combustibles fossiles, dans l'exploitation du gisement du pré-sal. Le gouvernement ne doit-il pas actualiser sa position environnementale ?

Carvalho – Si, il le doit. Dans le cas de l'eau à São Paulo, il y a un problème environnemental, mais il ya aussi une absence de chantier. Mais la question environnementale que nous devons, selon moi, actualiser est liée à la question urbaine. À la fortification du transport collectif et à la diminution des aides au transport individuel. 

Du point de vue de la matrice énergétique, nous devons investir dans la diversification. Dans le cas de la déforestation, il nous faut une conversion vers l'organique et l'agrobiologique. Nous avons un programme pour universaliser ces pratiques, entre autre pour le latrfundio (grandes propriétés agricoles - NDT). Nous avons besoin de rendre ces formules économiquement rentables. Il nous faut rompre la barrière qui fait que le Brésil est le plus gros consommateur de défensifs agricoles (chimiques) du monde.

BBC Brasil – Cela ne contredit-il pas la stratégie actuelle du gouvernement de concéder des prêts toujours plus importants aux grands producteurs de matières premières agricoles qui utilisent amplement les OGM et les pesticides ?

Carvalho – Au contraire, on peut utiliser le financement comme une manière de réduire les intérêts pour ceux qui emploient des techniques moins offensives à la nature.

BBC Brasil – Vous avez déjà discuté avec la présidente de votre position dans les 4 prochaines années ?

Carvalho – Non. Elle ne parle de ce sujet avec personne.

BBC Brasil – Vous continuerez dans le gouvernement ?

Carvalho – J'ai besoin de travailler, j'ai accumulé de l'expérience. Si elle m'invite à rester au gouvernement, j'y resterais. 

BBC Brasil – Certains disent que vous pouvez aller à la Funai ou assumer une ambassade à l'étranger.

Carvalho – Seulement si c'est en Afganistan (rires). Mais parlons sérieusement : n'importe quel ministre ici à l'Esplanade (lieu de Brasilia où sont concentrés tous les ministères - NDT) qui commenterait quoi que ce soit ne dirait que des bêtises.

Par: João Fellet
Source: BBC Brasil


© amazonia.org.br - traduit du portugais par Soutien Européen au Brésil Indigène / article original

Date de l'article : 10/11/2014

Retour