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L’ANECS en lutte pour la fin du massacre du peuple indigène brésilien

L’ANECS en lutte pour la fin du massacre du peuple indigène brésilien

Marcos Veron a été abattu en 2003 lors d'une tentative de réoccupation de sa terre. © Joaó Ripper/Survival

Source : anecsnacional.wordpress.com
Face aux derniers événements dans l'État brésilien du Mato Grsso do Sul et dans divers autres états du Brésil liés à la question indigène, l’Articulation Nationale des Étudiants en Sciences Sociales (ANECS) a décidé de rédiger une note publique. Découvrez-en la traduction sur notre site.

 

« Je suis un être humain
Je suis indigène quand les indigènes sont opprimés
Je suis ouvrier quand les ouvriers sont opprimés
Je suis étudiant quand les étudiants sont opprimés
Je suis Camiliste quand le peuple est maltraité »

Camilo Torres


Il y a plus de 500 ans que les indigènes brésilien subissent une spoliation constante de leurs terres et sont assassinés. Les indigènes du Mato Grosso do Sul ont épuisé leur patience avec ce qui est peut être la plus grande tragédie actuelle connue dans la question indigène dans le monde. Fatigués de la complicité du pouvoir public dans cette situation, les indigènes Guarani-Kaiowá réunis lors d’un Aty-Guasu, sorte de conseil politique indigène, ont décidé de reprendre toutes les zones indigènes du Mato Grosso do Sul dont l’homologation est suspendue par une décision du Tribunal Fédéral Suprême (STF).

Ils ont ainsi effectué une réappropriation à Paranhos d’une zone officiellement reconnue comme indigène en 2009, mais dont l’homologation fut suspendue par le STF. 200 indigènes ont participé à cette action, dont des femmes et des enfants. Il en est résulté un conflit avec des hommes armés et, selon les Indiens, l’indigène Eduardo Pires, d’environ 50 ans, serait disparu depuis. La mort d’un bébé de neuf mois, qui fut piétiné pendant la fuite des indigènes devant les tirs des hommes de mains, a été considéré par les Guaranis et est reconnue par la Funai comme une conséquence de l’attaque subie par le groupe durant l’occupation. Depuis, les « fazendeiros » du Mato Grosso do Sul ont déclaré la guerre aux indigènes et ont promis que le sang coulerait  dès cette semaine (du 19 au 24 août).
Voir la vidéo : http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=1tvfASuar4M

Avant de poursuivre, il faut comprendre la question indigène dans le Mato Grosso do Sul. Cet état de la région centre-ouest abrite la deuxième plus importante population indigène du Brésil (73 295 personnes), les Guarani-Kaiowá étant le plus grand groupe indigène du pays (45 mille personnes). De l’autre côté, il y a une puissante élite locale associée au capital transnational qui finance l’agro-industrie. L’agro-industrie, un des piliers de l’économie exportatrice brésilienne, occupe une grande partie des terres indigènes, transformant cet état en une mer de soja, de canne à sucre et de patûrages destinés à l’élevage bovin. Cela provoque une intensification des conflits entre les « fazendeiros » et les indigènes de la région.

Mais le mouvement guarani-kaiowá pour la récupération des terres n’est pas récent, il est apparu dans les années 1980, lors du renforcement de la redémocratisation. Au cours des 4 décennies antérieures, les indigènes avaient vu leur territoire être occupé progressivement par des milliers de colons venus de diverses régions du pays, avec le soutien officiel, aussi bien du gouvernement fédéral que du gouvernement de l’état du Mato Grosso (la création du Mato Grosso do Sul n’eut lieu qu’en 1979). Dans les années 1970, s’est intensifié le processus d’expulsion des centaines de groupes locaux vers huit réserves qui avaient été démarquées entre 1915 et 1928 par l’ancien Service de Protection à l’Indien (le SPI, substitué par la Funai en 1968). Fin 2007, la Funai signe, avec le Ministère Public Fédéral (MPF), et en présence de témoins de l’Aty Guasu, un Engagement d’Ajustement de Conduite pour résoudre une fois pour toutes la situation des terres guarani-kaiowá. Une estimative initiale faite par des anthropologues est de 600 mille hectares à identifier. Au vu de la durée des processus d’identification, les Guarani-Kaiowá occupent les terres revendiquées pour faire pression sur les autorités. Le résultat fut une série de conflits sanglants depuis 2009. Sans une action plus ferme du pouvoir public, d’autres problèmes continueront certainement à se produire.

Les chiffres de la violence contre les peuples indigènes au Mato Grosso do Sul sont impressionnants. Dans un rapport annuel publié par le CIMI (Conseil Indigèniste Missionnaire), on constate que les assassinats d’indigènes au Mato Grosso do Sul sont plus nombreux que dans tous les autres états brésiliens. Pendant les derniers gouvernement (de 2003 à 2011), 503 indigènes furent assassinés au Brésil, dont 279 dans le seul Mato Grosso do Sul, ce qui fait un pourcentage de 55% de l’ensemble des assassinats d’indigènes sur le territoire national. Une véritable situation de guerre, dans laquelle sont morts plus de gens au Mato Grosso do Sul que dans des pays en guerre tel l’Iraq. Alors qu’en Iraq il y a 93 assassinats pour 100 mille personnes, dans la seule région de Dourados, il y en a 145 pour 100 mille personnes. Ce tableau du CIMI fait un comparatif annuel entre les assassinats des indigènes brésiliens et ceux du Mato Grosso do Sul :

Assassinats au Brésil et au Mato Grosso do Sul (MS)
 
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Total
Moyenne
Total Brésil
42
37
43
58
92
60
60
60
51
503
55,8
Nombre absolu MS
13
16
28
28
53
42
33
34
32
279
31
Nombre absolu restant
29
21
15
30
39
18
27
26
19
224
24,8
MS (%)
33%
43%
65%
48%
58%
70%
54%
57%
62%
55%
54,5

En ce qui concerne les homologations de terres indigènes, la situation est plus que morose et on peut affirmer que le gouvernement traîne de la patte. Si nous faisons un comparatif des homologations effectuées par gestion présidencielle, les gouvernements Lula et Dilma ont les pires indices depuis la redémocratisation du pays. Voyons les données du CIMI :

Homologations de terres indigènes par gestion présidentielle
Gouvernement
periode
Nb d'homologations
Moyenne annuelle
José Sarney
1985 - 1990
67
13
Fernando Collor de Melo
jan. 1991 - sep. 1992
112
56
Itamar Franco
oct. 1992 - déc. 1994
18
9
Fernando Henrique Cardoso
1995 - 2002
145
18
Luiz Inácio Lula da Silva
2003 - 2010
79
10
Dilma Rousseff
2011
3
3

Face à cette situation effrayante de violence envers les peuples indigènes, de non réalisation par le gouvernement des homologations des terres, de problèmes de santé dans les populations indigènes (des centaines d’indigènes meurent en raison du manque d’assistance de la santé publique, de la dénutrition, de mortalité infantile...), de suicides (parmi les Guarani-Kaiowá, uniquement, il y eut 555 suicides de 2001 à 2011), de violence sexuelle, de racisme et de discrimination éthnico-culturelle, d’accidents de la route dont les indigénes sont victimes parce qu'ils sont relégués sur le bord des axes routiers, et de multiplication des assassinats, le CIMI et l’ANECS considèrent les 3 pouvoirs (éxécutif, législatif et judiciaire) coupables de crimes contre les droits de l’homme et coupables de la tragédie dont souffrent les indigènes.

Nous, membres de l’Articulation Nationale des Étudiants en Sciences Sociales, avons décidé, lors de la XXVIIº Rencontre Nationale des Étudiants en Sciences Sociales (ENECS) qui s'est tenue en juillet 2012 à Santa Maria (Rio Grande do Sul), que notre principale lutte serait le déplacement et l’expulsion de populations urbaines et rurales. Parmi les populations rurales, ainsi que nous l’avons vu, les indigènes sont ceux qui subissent le plus ces expulsions en raison de l’expansion de l’agro-industrie et des grands chantiers de la stratégie énergétique du pays (voir Belo Monte), en étant, dans la plupart des cas, expulsés de leurs terres et assassinés par les « fazendeiros » et les agents du gouvernement.

Les étudiants en Sciences Sociales de tout le Brésil ne se tairont pas face à cette barbarie se produisant à l’encontre de la population indigène du Brésil et principalement au Mato Grosso do Sul. Nous dénonçons donc publiquement ces tueries, cette effusion de sang, ce génocide des indigènes au Brésil. Et afin d’avancer vers la résolution de ces problèmes, ce que les indigènes appellent le « bien-vivre », l’ANECS défend :

1 – Que soient homologuées toutes les terres indigènes reconnues comme telles au Brésil.
2 – Que le gouvernement brésilien empèche le massacre annoncé au Mato Grosso do Sul, et que tous les « fazendeiros » impliqués soient punis.
3 – l'annulation de la PEC 215 ! L’objectif de cet amendement constitutionel est d’attribuer au Congrès National la fonction de démarquer et d’homologuer les terres indigènes, les quilombolas et les zones de conservation environnementale qui, selon la constitution fédérale , sont de la compétence du pouvoir éxécutif.
4 – La révocation de l’ordonnance 303 de l’AGU. Cette ordonnance détermine, entre autres choses, que les terres indigènes peuvent être occupées par des unités ou des postes militaires, le réseau routier, et des projet hydro-électriques ou miniers d’ordre statégique, sans consultation des populations affectées.

ANECS – Articulation Nationale des Étudiants en Sciences Sociales

Vies détruites
Au bord de la route,
Lors de la réappropriation,
Dans le confinement,
Les vies de souffrance
Des Kaiowá Guaranis
Sont accidentées,
Abrégées,
Coupées !
C’est le chemin de croix,
De la souffrance,
De la lutte,
De l’espoir,
De la terre sans maux !
(Egon Heck – Indigène du Peuple Guarani et du Mouvement Pour la Vie, la Terre et le Futur)


© anecsnacional.wordpress.com / Traduit du portugais par Chico Libri

Date de l'article : 10/09/2012

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