Belo Monte :
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BELO MONTE : la violence venue avec l'usine

BELO MONTE : la violence venue avec l'usine

© Istoé independente

Source Istoé independente
La région affectée par les travaux de Belo Monte, dans le Pará, souffre d’une progression de la criminalité. Ces dernières années, peu de travaux ont suscité autant de polémiques que la construction de l'usine hydroélectrique de Belo Monte, sur le fleuve Xingu, dans l’Etat du Pará. La controverse est loin de se limiter aux seuls impacts sur l’environnement et sur les communautés autochtones, ou même sur les populations éloignées par la force afin de construire l’usine.


Les autorités policières, les habitants et des responsables d’associations sociales, incriminent le mouvement migratoire occasionné par cet ouvrage – qui a débuté en juin dernier [2011] – comme étant la cause de l’augmentation de la violence dans les 11 municipalités directement concernées par la centrale hydroélectrique : trafic de drogues, viols, menaces, port illégal d'arme, flagrants délits et agressions aux personnes connaissent une envolée dans les statistiques policières.

La peur gagne la population et les commerçants d’Altamira, la plus importante ville de la zone de Belo Monte. Cette agglomération de 100.000 habitants a vu, entre 2010 et 2011, le nombre de délits croître de 62% et la quantité d’armes saisies de 379%, d’après les chiffres de la Superintendência da Polícia Civil [Surintendance de la police civile] du Xingu. Ainsi, l’année dernière [2010], on n’avait enregistré aucun vol suivi de meurtre, alors que cette année on en comptabilise déjà cinq. « Le trafic de drogue, les attaques de banques se sont intensifiés dans la région du Xingu en raison du flux migratoire et du transfert des fonds induits par l’ouvrage, affirme le commissaire Paulo Kisner, chef par intérim de la Police fédérale d’Altamira. « Les villes du Xingu souffrent d’un manque d’investissement et la conséquence en est l’augmentation du coût de la vie pour une population déjà majoritairement pauvre », dit Antonia Melo, coordonnatrice de l’ONG Xingu vivo para sempre. De plus, ajoute le commissaire, on constate l’augmentation du nombre de militants associatifs qui demandent la protection du Ministère Public Fédéral.


Dans la banlieue d'Altamira, où les rues goudronnées et les maisons en dur sont rares, les délinquants gagnent du terrain. C’est ici que logent les travailleurs venus d’autres villes et d’autres Etats attirés par l’ouvrage. Au lieu dit Baixão do Tufi, des habitants de la Rua dos Operários [Rue des Ouvriers] qui souhaitent garder l’anonymat dénoncent la présence d’hommes armés qui les obligent à payer un péage pour circuler dans la rue après 22h. Les descentes policières afin d’appréhender des suspects, de saisir des armes et des drogues, sont de plus en plus fréquentes. Mais les PMs se plaignent du manque des moyens. « Nos motos ne disposent que de trois litres d’essence par jour, nos voitures de dix : une seule voiture de police peut patrouiller la nuit. Nous manquons également de munitions », a déclaré un PM qui n’a pas voulu s’identifier.
Ailleurs, sur un site connu comme Baixão da Olaria, les points de vente de crack et de cocaïne prolifèrent comme des virus. C'est là qu’a eu lieu le crime le plus choquant de l'année dans la région: le lynchage de Francisco Galvão, 17 ans, par une bande de chauffeurs de taxi. Le malheureux avait essayé de défendre son frère Franciel, accusé d'avoir participé au braquage d’un chauffeur. Il a été roué de coups et poignardé. Un chauffeur arrêté pour ce crime a été libéré par ses collègues qui ont pris d'assaut le poste de police, où l'effectif se réduisait à ce moment-là à un greffier. Le père du jeune homme, José Roberto Galvão, 39 ans, a depuis quitté la ville : « Francisco était un jeune garçon travailleur, il ne se droguait pas et ne faisait jamais parler de lui. Le lieu, ici, est devenu barbare : c’est maintenant chacun pour soi », a-t-il déclaré.

Le week-end dernier, il était impossible de déposer plainte dans ce même commissariat : les policiers étaient débordés de travail en raison des cinq meurtres survenus dans la ville en moins de 24 heures - un record. « Je suis très inquiet par l’augmentation des délits commis par des adolescents », a dit le procureur d’Altamira, Gerson Daniel Silva da Silveira. Sur l’ensemble du Xingu, le nombre d'adolescents détenus pour des infractions pénales a augmenté de 119% depuis l'année dernière.

Le gouvernement avait imposé une clause dans le cahier des charges de Norte Energia, une des entreprises responsables de la construction de Belo Monte. Il s’agissait de l’obligation de participer à la sécurité publique. Le Consortium a donc signé un accord avec le ministère de la Sécurité publique du Pará où il s’engageait, avant 2013, à injecter environ R$ 100 millions de reals sur des projets sécuritaires dans 11 municipalités. Jusqu'à présent, il n’a placé que R$ 4,8 millions de reals. Norte Energia assure pourtant avoir attribué des fonds afin de louer des voitures et acheter des motos destinés au parc de la police, afin de rénover les locaux des pompiers, de la police civil et de la police militaire. « Nous constatons en ville une augmentation du coût de la vie, alors que les investissements en infrastructure sont minces par rapport au flux migratoire provoqué par l’ouvrage », a déclaré le procureur de la République, Claudio Terri do Amaral.

Interrogés par ISTOÉ, le colonel Mario Solano, commandant-général de la PM du Pará, et Silvio Maués Batista, chef de la Policia do Interior, ont affirmé que plusieurs indices de criminalité dans la région sont orientés à la baisse : les homicides, les vols et les larcins enregistrent une légère réduction. Ils attribuent le nombre d’arrestations, notamment de trafiquants, à une meilleure efficacité de la police. Toutefois, pour le Mapa da Violência 2012 [Carte de la Violence 2012] (voir encadré ci-dessus), le taux moyen d'homicides à Altamira est très élevé: 52,7 pour 100 000 habitants, cinq fois plus que celui recommandé par les Nations Unies. Toujours d’après cette étude menée par l'Instituto Sangari, le nombre d'homicides à Altamira a augmenté de 56,7% pendant les trois dernières années. On estime à 20 mille le nombre de personnes vont encore venir au Xingu pour travailler au barrage de Belo Monte. Il faut éviter que la criminalité ne progresse autant que le rythme de l’ouvrage.

 



LES HOMICIDES MIGRENT VERS LA PROVINCE

En moins de dix ans, les taux d'homicides des villes de province vont dépasser ceux des capitales et des régions métropolitaines du pays. Voici l'une des principales conclusions de l’étude Mapa da Violencia 2012 [Carte de la Violence 2012] réalisée par l’Institut Sangari, publiée la semaine dernière. Des données obtenues auprès des Ministères de la Santé et de la Justice révèlent que, dans la dernière décennie, les meurtres ont subi un fort processus de provincialisation au Brésil. La progression de la violence a été plus élevée dans les petites municipalités, surtout dans celles de 20 mille à 50 mille habitants, c’est-à-dire, justement celles où le taux de violence était le plus faible dans les années 1990.

Une autre conclusion de l’étude est que ces taux finiront par s’homogénéiser au niveau des Etats. Parmi les plus violents, l’Etat d’Alagoas arrive en tête avec 66,8 homicides pour 100 000 habitants. D'autres Etats connaissent aussi une croissance vertigineuse de la criminalité, comme le Pará, le Paraíba et Bahia. La note positive vient de São Paulo qui a réduit son taux de 42,2 meurtres pour 100 000 habitants à 13,9 : l'Etat le plus riche de la fédération a cessé d'être le cinquième le plus violent pour devenir le 25ème.

L’étude révèle  une autre donnée alarmante. Au cours des 30 dernières années, 1,1 millions de Brésiliens ont été assassinés. « C'est comme si une ville entière avait été touchée par une bombe atomique », a déclaré le coordinateur du Mapa da Violência 2012, Julio Waiselfisz. Le taux national a connu une légère baisse par rapport à la décennie précédente, passant de 26,7 à 26,2.

© Flávio Costa / Istoé independente / traduction Arkan Simaan

http://www.istoe.com.br/reportagens/183241_A+VIOLENCIA+QUE+VEIO+COM+A+USINA?pathImagens=&path=&actua

Date de l'article : 24/12/2011

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